Le classement mondial des meilleures universités est fait chaque année dans le but de faire la promotion de certaines hautes écoles et instituts supérieurs des diverses universités du monde. Pour l’année 2017, ce classement a été réalisé, comme d’habitude, par le Times Higher Education qui a répertorié les meilleurs établissements universitaires. Environ 77 pays sont représentés dans cette édition de 2018. Les universités anglo-saxonnes et européennes sont les mieux classées d’entre toutes. Quand aux critères qui prévaut dans cet ordre, ils sont au nombre de 13. Ce sont, entre autres, la réputation de l’université, le nombre de publications académiques par an, le nombre d’étudiants étrangers, le transfert de connaissances …
Les deux premières places du podium sont revenues à des universités du Royaume Uni. Ainsi, « Oxford » et « Cambridge » sont en tête du classement « Malgré les pressions politiques post Brexit qui visent l’enseignement supérieur» selon le directeur de Times Higher Education. Viennent ensuite 05 universités américaines qui occupent les 07 meilleures places parmi les 10 premières alors que le Paris Sciences et Lettres de France est à la 72éme place. Les universités chinoises atteignent pour la première fois le top 30 du classement alors que les établissements indiens ont dégringolé du groupe 201/250 des meilleures universités à celui du 251/300. L’Amérique latine, dont l’enseignement supérieur a décliné, à cause de problèmes financiers et de la fuite des cerveaux, a vu ses universités disparaitre du classement.
En Algérie, à chaque fois que nos universités (la première remonte au 19éme siècle) se sont retrouvées dans ce classement, c’est presque toujours l’université des sciences et technologie de Bab Ezzouar qui est concernée même si la place est très loin derrière (au delà de 2000). Il faut dire que certains de nos établissements ne possèdent même pas de site internet ou tout au moins n’est pas mis à jour avec les différentes publications et recherches alors que le site internet constitue un critère de classement. Ainsi, on se retrouve, en Algérie, avec des universités qui ne sont pas connectés au réseau international des universités. Mais le problème n’est pas seulement en cela. La gestion administrative approximative et bureaucratique, la mauvaise orientation des bacheliers, les conditions de travail des enseignants, notamment les enseignants chercheurs, recherche amoindrie avec objectifs autres que pédagogiques ont fait que les universités algériennes ne sont pas performantes. On oblige un doctorant à traduire ses recherches en arabe alors qu’il a fait ses études et sa thèse dans une autre langue (après cela, vous avez des monstres linguistiques qui n’expriment pas forcément les idées que l’étudiant veut rendre et transmettre.) Chez nous, un doctorant, sur le point de soutenir sa thèse, doit se débrouiller pour trouver la salle, déplacer les chaises d’une autre salle dans celle où il va soutenir, ramener lui-même le data show …(l’exmple a été vécu à Bouira)
En outre, les méthodes d’enseignement classiques, qui visent l’acquisition de savoirs livresques et théoriques sans initiatives, ni esprit critiques, ont montré leurs limites. Il est rare, dans une université algérienne, d’entendre parler de pratique, de lier la vie universitaire à la vie sociale, au secteur économique et aux entreprises du pays. On a beau, pour cela organiser des colloques, préparer des séminaires, réunir des experts, ça reste au stade de palabres entre initiés. En sus de cela, les salaires des cadres de l’enseignement supérieur n’encouragent pas à la recherche et quand l’un d’entre eux vous rappelle que le steward touche mieux que lui (17 millions de centimes sans compter la prime en euros), ce n’est pas un prétexte pour « assurer un service minimum » mais une réalité.
Et quand on sait qu’il y a des organisations estudiantines qui s’occupent beaucoup plus des tenues vestimentaires des étudiantes que de leurs cours, qui sont là pour intimider quand ce n’est pas pour menacer leurs camarades démocrates, on ne doit pas se lamenter sur notre sort mais prendre le taureau par les cornes. L’intolérance et l’idéologie ont pollué l’université algérienne et empoisonné la vie des étudiants. Rappelons également qu’en 2009, l’UGEL, qui s’appelle, aussi paradoxal que cela puisse paraitre, « ETUDIANTS LIBRES » avait « reproché » à l’Etat de « vouloir ressusciter des dialectes pour salir la langue arabe.» Et cela 07 ans après la reconnaissance de tamazight comme langue nationale dans la constitution de 2002.
Certains responsables politiques se vantent d’avoir bâti (en fait, il s’agit exactement de cela, de bâti, de béton sans savoirs et sans âmes) des universités ou centres universitaires dans chaque wilaya en feignant d’ignorer que le niveau est catastrophique et que l’arabisation a échoué. Selon une étude, les universités où les recherches ont abouti à des inventions et à des créations et les études ont réussi, c’est soit l’anglais ou la langue maternelle qui ont été utilisées. Doit-on nous étonner et faire les vierges effarouchées à chaque fois que le constat est amer et effrayant ? Ce n’est pas la réaction la plus saine, ni la plus adulte, ni la plus responsable. Il y a aussi certaines décisions politiques, « très politisées », pour ne pas dire politiciennes, qui n’ouvrent pas la voie à des initiatives qui veulent aller de l’avant, briser des tabous et oser. Ainsi, les dernières décisions qui octroient des agréments à des universités privées sont loin d’être innocentes. Elles acceptent des universités avec des filières telles que les mathématiques, la technologie, les sciences mais refusent l’agrément à la seule université qui voudrait former dans le droit, la communication, le journalisme. Au 21éme siècle, les gardiens du temple, toujours frileux, veillent sur nos valeurs, celles-là qui ne sont pas universelles même si çela doit coûter au pays.
Slimane Chabane