Il s’exprime pour la première fois sur l’affaire qui a ébranlé le système politique algérien, cet été. L’avocat du principal accusé dans l’affaire des 701 kg de cocaïne saisis au port d’Oran, Kamel Chikhi, surnommé « El Bouchi », Saïd Younsi, n’a pas fait dans le détail. Il évoque des « faits troublants » dans cette affaire et s’interroge sur « les nombreux manquement à l’application de la loi ».
Dans une interview accordée, ce lundi, au quotidien El Watan Saïd Younsi, lance de nombreuses interrogations qui jettent ainsi le doute sur le traitement de l’affaire du début jusqu’à la fin. En effet, de la levée des scellées sur le container contenu de la cocaïne au port de Valence en Espagne à l’arraisonnement du bateau transporteur de la marchandise en haute mer, l’avocat souligne de grave manquement aux procédures légales.
Affirmant que le dossier de son client « est vide », Saïd Younsi fait de nombreuses révélations. Il commence d’abord par le filtrage des images enregistrées par les caméras de surveillance installées dans le bureau d’El Bouchi. Il s’interroge, dans ce sens, sur l’arrestations de certaines personnes figurant dans les vidéos et pas d’autre, notamment un magistrat.
« Parmi les images, on voit un conservateur dans le bureau de Kamel Chikhi, avec un juge, président d’un tribunal administratif. Le conservateur est en prison, le magistrat n’a jamais été inquiété. Je ne dis pas que ce dernier est impliqué », déclare-t-il.
«Un responsable du ministère de la justice chez El Bouchi »
L’avocat se pose aussi la question de savoir pourquoi « un responsable du ministère de la justice s’est rendu en prison pour discuter avec Kamel El Bouchi ». « Pour quelle raison ce responsable se déplace-t-il en prison pour discuter avec Kamel Chikhi ? », demande-t-il, précisant qu’il ne connait pas encore les raisons de cette visite.
Défendant au passage « l’innocence de son client », Saïd Younsi dénonce un traitement de deux poids deux mesures dans cette affaire. « Chikhi a été emprisonné avant même que sa marchandise n’arrive au port. Souvenez-vous de l’affaire des 165 kg de cocaïne saisis à Alger en 2012. La drogue était dissimulée dans des cartons de poudre de lait importée par l’Onil. Peut-on croire qu’une société publique puisse pratiquer le commerce international de la drogue ? », rappelle-t-il.
Revenant sur l’ouverture du container suspecté sans la présence du représentant de la société de transport maritime pour pratiquer un contrôle visuel, l’avocat ajoute une couche. « C’est quand même troublant qu’on puisse suspecter la présence de drogue dans une marchandise et qu’on réagisse par un contrôle visuel », déclare-t-il, en s’interrogeant sur le comportement des autorités portuaires de Valence qui ont alerté les autorités algérienne de la présence de la cocaïne sans procéder à sa saisie à leur niveau.
Ce faisant, il évoque la question de l’arraisonnement du bateau transportant les 701 kg de cocaïne sans le laisser entrer au port pour pouvoir suivre la marchandise jusqu’à son destinataire.
« Puisque ce sont les gardes-côtes qui sont intervenus, et tenant compte de la hiérarchie, l’ordonnateur ne peut être que le chef de l’état-major de l’ANP. Mais c’est quand même intrigant que le navire soit arraisonné avant qu’il n’arrive au port », explique-t-il. « On aurait pu le laisser décharger la marchandise pour savoir à qui la drogue était destinée». Dans la foulée, Saïd Younsi réitère sa demande faite à la justice pour entendre « l’ancien DGSN, Abdelghani Hamel qui avait des déclarations fracassantes sur le sujet ».
Massinissa Ikhlef