Après onze éditions qui ont tenu toutes leurs promesses, la 12ème Rencontre poétique amazighe de la Soummam aura lieu du 27 au 30 du mois en cours.
L’événement organisé par l’association « Etoile Culturelle » d’Akbou, en partenariat avec les ministères de la Culture et de la Jeunesse et des Sports, le Haut-Commissariat à l’Amazighité (HCA) et plusieurs partenaires officiels ou du mouvement associatif, se tiendra à la maison de jeunes « Abderrahmane Farès » d’Akbou.
A l’instar des années précédentes où des figures poétiques de proue étaient honorées pour leur apport considérable à la poésie d’expression amazighe, cette année encore, cette 12ème Rencontre de la Soummam rendra hommage à la poétesse Nadia Benamer (voir encadré).
Placée sous le thème « La poésie engagée au profit de l’identité amazighe», cette rencontre poétique, dans sa version 2018, sera rehaussée par la participation au concours d’une centaine de poètes et 25 autres en hors-concours, ainsi que d’une douzaine d’exposants venant des différentes villes du pays.
Un riche programme sera déroulé pour l’occasion, étrenné par la projection d’un film-documentaire réalisé par le club audio-visuel de l’association organisatrice de l’événement. Un film qui donne un aperçu sur la vie et l’œuvre de l’invitée d’honneur de cette édition, à travers notamment les témoignages de ses amis et proches. La chorale de Boumerdès prendra ensuite le relai pour un intermède musical.
Durant la 2e journée, place au concours avec l’entrée en lice des poètes participants. Nadia Benamer montera également sur scène pour un récital poétique à travers lequel elle dévoilera un florilège de ses plus beaux poèmes écrits autour du thème générique choisi pour cette année.
Le débat académique s’invitera également à cette édition, à travers trois communications prévues dans la journée du 29 décembre et intitulées «Amkan n tmedyazt di tmetitakbaylit» présentée par Hassan Halouane, «Accuddu gar tutlayt d tsekla», proposée par Hamid Billak et «Renouveau lexical dans la poésie kabyle, le cas de Tafunast n yigujilen de Amar Mezdad», présentée par Hassan Mahrouche.
Enfin, une belle cérémonie de clôture interviendra au dernier jour de cet événement avec la proclamation des lauréats de cette cuvée 2018et remise des prix.
A noter que la Rencontre poétique amazighe de la Soummam est organisée chaque année pour «encourager et promouvoir la poésie amazighe, développer les échanges entre poètes de divers horizons, offrir un espace privilégié d’expression pour l’ensemble des participants, et éditer des recueils de poésie en tamazight».
Nadia Benamer, la Kabyle d’Oran
Native de Boghni, Nadia Benamer quitte sa Kabylie natale en 1981 pour aller vivre auprès de son époux à Oran. Un déracinement pour la jeune femme qui ne trouve de réconfort que dans l’amour et le soutien de ses proches. Malgré tout, son cœur ne cesse de pleurer sa Kabylie et sa langue maternelle qu’elle tiendra tout de même à transmettre à ses enfants tel un flambeau pour assurer la pérennité de ses racines et de son identité.
La poésie ? Elle a bercé ses années de jeunesse mais à Oran, la distance avec les mots s’impose tel un hiatus. Cependant, après des années de silence, la poétesse revient à la vie, en faisant à nouveau danser sa plume sous les vers susurrés par sa muse.
En rejoignant l’association « Numidia » d’Oran, son passé et son présent ne font plus qu’un. Elle écrit, certes, en français mais la langue n’est qu’un moyen -et non pas une fin – pour transmettre un message. Les thèmes où se conjuguent douleur, mal-être, séparation sont ceux du vécu de chaque femme. Elle écrit : «La tempête qui a soufflé/A balayé mes étoiles de la vie/Ma lampe s’est éteinte/L’ogre a sucé mon sang…»
L’année 1998 est une année charnière pour Nadia Benamer où l’assassinat du barde Matoub Lounes lui fait prendre conscience de la nécessité de dire sa douleur dans sa langue maternelle. « J’avais ressenti la plus grande douleur de ma vie à l’annonce de son assassinat», confie-t-elle. Paraît alors son premier poème en tamazight intitulé « Tighri ». Depuis, elle n’écrit plus qu’en kabyle, racontant avec la justesse des mots ce qui la touche dans sa vie de tous les jours : «La poésie résume tout, elle me fait vivre, me donne de l’oxygène. Je retrouve ma sérénité en écrivant des poèmes. C’est une relaxation. J’écris la nuit…aux environs de trois heures du matin, dans les moments difficiles. Quand je suis bien, je n’écris pas. Je rédige mes maux», dit-elle et d’ajouter : « J’écris sur ce que je vis et sur ce que les autres vivent».
Outre la poésie, Nadia Benamer a entrepris dernièrement la traduction du français vers tamazight du roman autobiographique de Fadhma Ath Mansour « Histoire de ma vie ». Des chapitres sont publiés chaque mois dans la revue de l’association Numidia d’Oran dont Nadia Benamer est un membre très actif.
Kahina A.